Écrivaine publique dans le Loiret et membre de l’AEPF, Pauline Godin reçoit des usagers à la bibliothèque des Jacobins et au centre communal d’action sociale à Fleury-les-Aubrais, l’une des vingt-trois communes de la métropole d’Orléans. Sur son site, elle raconte ses rencontres les plus marquantes*. En voici une.

Belle rencontre à la permanence d’écriture publique : où on vit la naissance d’une amitié.

Aujourd’hui, c’est jour de permanence d’écriture publique.
À mon rendez-vous de 11 h 45, je reçois un couple avec leur bébé.
Un petit bonhomme tout rond tout blond, avec des yeux bleus incroyables et un sourire à tomber par terre.
On s’est bien entendus, lui et moi. Quand il a tapé sur mon bureau avec sa main, que je l’ai imité, qu’il a rigolé, j’ai su : c’est le début d’une amitié.
Je ne sais pas trop ce qu’il sait de sa situation, de celle de ses parents. Il doit bien se rendre compte que Papa n’est pas là, qu’il ne dort pas avec Maman, qu’il ne s’occupe pas de lui la nuit.
Pourtant, il voudrait bien, Papa, lui changer la couche pleine de caca à trois heures du mat’.
Mais il ne peut pas.
Comme il n’y a pas assez de places pour tout le monde, priorité est donnée aux femmes et aux enfants. C’est pour ça que Maman et lui dorment à l’hôtel, et que Papa dort dans la rue.
Ça fait cinq mois que ça dure.
Est-ce qu’il se souvient, ce petit, de sa vie d’avant ? De là où il est né, du pays d’où il vient, de ce qu’il a vu quand il a ouvert les yeux la première fois ?
Avec son papa et sa maman et le traducteur de leur téléphone, on remplit une demande de logement.
Peut-être que, grâce à ça, ce bébé pourra grandir au chaud, dans un appartement, avec son papa et sa maman qui pourront tous les deux changer des couches pleines de caca à trois heures du mat’.
C’est tout ce qu’ils demandent.

Pauline Godin

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