Largement utilisées dans le langage courant, les abréviations s’invitent également très souvent dans nos écrits. Ces mots que l’on abrège « pour aller plus vite » nous font perdre un temps précieux quand il s’agit par exemple de déterminer s’ils prennent la marque du pluriel ou si la grammaire, dans les profondeurs de ses règles les moins connues, ne recèlerait pas une exception les rendant invariables. Focus cette semaine sur les abréviations et apocopes, c’est-à-dire les mots dont on a retranché la lettre ou la syllabe finale.
Impossible de se passer des apocopes, qui pour certaines ont presque remplacé le mot initial qui se trouve ainsi raccourci. La liste suivante n’est pas exhaustive mais donne un aperçu de la quantité de mots concernés : ciné (cinématographe), photo (photographie), stylo (stylographe), pneu (pneumatique), vélo (vélocipède), auto (automobile), bac (baccalauréat), manif (manifestation), fac (faculté), prof (professeur), météo (météorologie), télé (télévision)… Le terme abrégé est d’abord considéré comme familier, puis il éclipse dans le langage courant le terme complet, qui est alors recherché ou vieilli. Ces mots tronqués prennent au besoin la marque du pluriel. On écrira donc : des photos de vacances, des pneus usés, des télés dernier cri…
Le procédé d’abréviation est marqué quant à lui par la présence d’un point abréviatif. On utilise le point abréviatif lorsque le mot est réduit à sa/ses première(s) lettre(s). On orthographie ainsi : M. (pour Monsieur – et non Mr qui est l’abréviation de l’anglais Mister non valable en français), av. (pour avenue ou avant, selon le contexte), adj. (pour adjectif), gramm. (pour grammaire)… Pour les locutions, on place autant de points abréviatifs qu’il y a de mots à abréger sans espace entre les lettres : N.B. (Nota Bene), P.-S. (Post-scriptum)… Avec un mot composé, on conserve le trait d’union : J.-C. (Jésus-Christ). Vous l’aurez remarqué si le mot exige une majuscule, celle-ci sera maintenue dans l’abréviation.
Exception faite de certains titres de civilités comme MM. (pour Messieurs), LL.MM. (pour Leurs Majestés), où le pluriel prend la forme d’un redoublement de lettres, dans tous les autres cas, les abréviations resteront invariables.
Notez que le point abréviatif n’exclut pas l’utilisation des signes de ponctuation, mais il se confondra toutefois avec le point final et les points de suspension. Il faudra alors écrire : Veux-tu des pommes, des poires, etc. ? Je veux des fraises, des framboises, etc.
En ce qui concerne les mots réduits à la première et la/les dernière(s) lettres, ils seront notés par une majuscule suivie des autres lettres sur la même ligne (ou en exposant), mais toujours sans point abréviatif. Ainsi écrirons-nous : Dr (pour Docteur), Bd (pour boulevard), Mme (pour Madame), Mlle (pour Mademoiselle), Ets (pour Établissements), Cie (pour Compagnie)… Dans ce cas, autrement dit lorsque l’abréviation conserve la dernière lettre du mot, le « s » du pluriel s’ajoutera : Mmes (pour Mesdames), etc.
Pour terminer, nous remarquerons que l’abréviation à l’aide de points de suspension peut avoir un rôle euphémisant et permet de masquer un mot grossier qui sera néanmoins facilement deviné : Il s’est cassé la g… Qu’est-ce qu’il allait f… là ? Par discrétion, on pourra encore conserver un anonymat ou rester évasif sur une date, en utilisant au choix points de suspension ou astérisques : M. D*** accusé de crime ; au cours des manifestations de 19… les blessés furent nombreux.
Mmes et MM. les E.P., à vos stylos !