Par Sandrine Chevillon
Petit rappel pour les distraits : les verbes auxiliaires sont ceux qui se départissent de leur signification propre et deviennent de simples éléments morphologiques au sein de constructions avec un participe passé, un infinitif ou un gérondif.
Parallèlement aux auxiliaires principaux avoir et être, qui sont toujours auxiliaires de temps, il faut mentionner certains verbes, appelés semi-auxiliaires, qui construits avec un infinitif, permettent d’exprimer diverses nuances de temps, de mode ou encore d’aspect. La grammaire les considère comme des auxiliaires dans la mesure où leur sémantisme se réduit à une indication grammaticale et leur construction est similaire à avoir/être + participe passé. La liste de ces auxiliaires n’est cependant pas fermée : si certains ont indiscutablement un statut comparable à avoir et être, d’autres possèdent un sens lexical qui les rapproche plutôt d’un verbe ordinaire.
Ainsi les auxiliaires d’aspect saisissent l’action à différents stades de sa réalisation, du stade antérieur (c’est-à-dire au début du procès), au stade postérieur (à savoir son terme final).
• Pour indiquer le début de la réalisation du procès, on utilisera aller, être sur le point de, être en passe de (qui, pour sa part, connote ordinairement l’idée d’une situation positive), ou encore être près de. Notons que le verbe aller ne s’emploie qu’au présent, où il a le sens d’un futur simple, et à l’imparfait, où il concurrence le conditionnel présent indiquant par là une action postérieure dans le passé. De ce fait, elle va/est sur le point de/est près de chanter signifie qu’elle chantera dans un avenir proche. Elle allait danser induit qu’elle aurait dansé si elle ne s’était pas foulé la cheville…
• L’aspect inchoatif, autrement dit le déclenchement de l’action, est exprimé à l’aide des verbes commencer à/de et se mettre à : Il commence à pleuvoir.
• Un procès en cours de réalisation et ancré dans une certaine durée est évoqué par les locutions être en train de et être en voie de (qui, quant à lui, indique, de plus, qu’on est prêt à faire l’action, qu’on s’y dispose ou qu’on y travaille). La tournure littéraire (s’en) aller + (en) participe présent traduit aussi cette idée. Il est en train de dormir équivaut donc à il va dormant. On pourra encore écrire : Le mal va croissant ; Le phénomène va en augmentant ; Il s’en va pleurant…
• En revanche, être loin de permet de signifier que l’on se trouve dans des dispositions contraires à celles qui porteraient à faire l’action dont il s’agit. En d’autres termes, s’il est bien loin de se vanter de ses fautes d’orthographe, c’est parce qu’il a conscience de ses lacunes en la matière.
• Afin de marquer un procès en voie d’achèvement, on optera pour finir de, cesser de, achever de… En conséquence, elle finit de manger indique que l’action, sur le point de se terminer, se déroule encore.
• Venir de et sortir de saisissent le procès immédiatement après son stade final. Ainsi, il vient de terminer ses exercices de grammaire, nous indique que l’enfant a fini ses devoirs. On peut considérer que ces locutions expriment un passé proche. Attention toutefois à ne pas confondre venir de qui fait référence à un fait passé et venir à qui traduit un fait fortuit. De facto, s’il vient à passer n’a pas le même sens qu’il vient de passer.
• En corrélation, ne faire que de indique également un passé proche : Le soleil ne faisait que de paraître, lorsqu’il ouvrit les yeux. Prudence, néanmoins, car il ne faut pas confondre avec la locution ne faire que + infinitif qui souligne la continuité ou la restriction : Il ne fait que parler (le bavard) ; Elle ne fait qu’exécuter les ordres (mais elle ne prend aucune décision).
Par ailleurs, les auxiliaires modaux ont pour fonction de renseigner sur la modalité du discours énoncé.
• Pourvoir et devoir expriment diverses valeurs modales fondamentales : la possibilité, la probabilité, la capacité, la permission, l’obligation ou l’approximation. Ces nuances apparaissent dans les phrases suivantes : Elle peut arriver ce soir ; Il peut parler anglais si cela vous arrange ; Les enfants peuvent aller chez leurs amis mais doivent rentrer pour 21 heures ; Il peut/doit pleuvoir demain… Devoir permet en outre de présenter l’action comme plus ou moins certaine, convenable, nécessaire, souhaitable ou bien même future. Aussi noterons-nous : La nature doit être magnifique en cette saison. Sa lettre doit arriver dans quelques jours…
• Vouloir exprime la volition (c’est-à-dire la manifestation de la volonté) ou envisage une action à venir teintée d’une volonté figurée : Elle veut apprendre les subtilités de la grammaire ; Le tiroir ne veut pas s’ouvrir ; Cette année, il ne veut pas pleuvoir…
• Paraître et sembler appréhendent le procès d’un point de vue subjectif. L’enfant paraît/semble dormir traduit en effet la seule impression du locuteur.
• Présenter un fait comme le reflet d’une opinion publique revient à utiliser passer pour : S’il n’est savant, du moins il passe pour l’être.
• Laisser évoque une action permise par le sujet : Les policiers ont laissé partir le suspect.
• Faillir et manquer (de) mettent en avant qu’un fait a été tout près de se produire : Il a failli ouvrir son manuel de grammaire.
• Être pour véhicule l’idée d’un fait prochain, présente une action comme convenue ou préparée, et marque la nuance qu’exprimeraient être de nature à/disposé à/destiné à : Cette décision n’est pas pour lui déplaire.
Avis aux fashion scripteurs ! Des soldes ont été signalées, pour trois fois rien ces auxiliaires sont disponibles dans tous les bons dictionnaires de vos bibliothèques. N’hésitez à pas vous en servir !